Pourquoi il est urgent de mettre à jour notre orthographe
A l’initiative du collectif Les linguistes atterré(e)s, des linguistes, enseignants, universitaires et personnalités de la culture appellent à une application effective des rectifications orthographiques de 1990.
Extraits de la tribune publiée dans Le Monde en date du 15 octobre 2023 :
"Sommes-nous forcés d’écrire à la plume, de lire à la bougie ? Et pourtant, partout, on nous impose de lire et d’écrire avec une orthographe de 1878, oui, 1878. Alors que l’orthographe rectifiée de 1990 figure dans tous les dictionnaires, dont celui de l’Académie française.
C’est pourquoi, nous, francophones de différents pays, demandons à nos institutions, mais aussi aux médias, aux maisons d’édition, aux entreprises du numérique, de nous offrir des textes, des messages, en nouvelle orthographe, et d’aller plus loin dans cette voie. Réformer l’orthographe ne veut pas dire réformer la langue. On peut être bon en français, par la richesse de son vocabulaire, sa créativité et son argumentation, et mauvais en orthographe. Et c’est de plus en plus le cas aujourd’hui.
Les enquêtes PISA et PIRLS (Programme international pour le suivi des acquis des élèves et Programme international de recherche en lecture scolaire) indiquent que les pays francophones consacrent plus d’heures à l’enseignement de la langue maternelle que les autres pour des résultats plus faibles, et que les élèves français s’abstiennent plus souvent de répondre, probablement par peur de la faute. L’opacité de notre orthographe en est en partie responsable. Et le temps passé à enseigner ses bizarreries et incohérences l’est au détriment de l’écriture créative et de la compréhension.
L’orthographe, née avec l’imprimerie, n’a cessé, au fil du temps, d’être retravaillée par les grammairiens, les imprimeurs, et par l’Académie française jusqu’à la fin du XIXe siècle. On estime qu’entre les XVIIe et XIXe siècles, la moitié des mots ont vu leur graphie changer au fil des réformes. Depuis, plus rien, alors que la plupart des langues européennes mettent à jour leur orthographe régulièrement, pour accompagner leur évolution."
Parmi les signataires :
Mathieu Avanzi, linguiste, Université de Neuchâtel (Suisse) ; Geneviève Brisac, écrivaine ; Stéphane Bureau, directeur général des éditions Retz ; Heather Burnett, linguiste atterrée, CNRS ; Maria Candéa, linguiste atterrée, Sorbonne Nouvelle ; Bernard Cerquiglini, linguiste, université Paris Cité ; Marie Darrieussecq, écrivaine ; Marie Desplechin, autrice ; Xavier Dessaucy, Association belge des professeurs de français de la Fédération Wallonie-Bruxelles ; Cynthia Eid, présidente de la Fédération internationale des professeurs de français ; Annie Ernaux, autrice ; Cynthia Fleury, philosophe, CNAM ; Françoise Gadet, linguiste atterrée, université de Nanterre ; Claude Hagège, linguiste, Collège de France ; Arnaud Hoedt, auteur atterré ; Jean-Marie Klinkenberg, linguiste atterré, membre de l’Académie royale de Belgique ; Bernard Lahire, sociologue, CNRS ; Rachel Panckhurst, linguiste atterrée, université de Montpellier ; Katya Pelletier, présidente de l’Association québécoise des professeurs de français ; Charles Pépin, philosophe ; Elisabeth Roudinesco, historienne, vice-présidente de l’Institut histoire et lumières de la pensée ; Henriette Walter, linguiste, université de Rennes ; Martin Winckler, auteur ; Viviane Youx, présidente de l’Association française pour l’enseignement du français ; Valérie Zenatti, écrivaine.
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Photo © Cité internationale de la langue française